Par la voix

Sans te toucher je m’approche
Et je te saisis par la parole

Attaché par mes phrases
Chuchotées dans la pénombre
Tu te débats contre la tessiture
De ma gorge

Je te suce avec ma voix
Mes mots condensent sur ta peau
Ils laissent des traces
De morsures

Je taille tes fantasmes
À la flèche de ma langue

Et quand mon verbe effleure enfin ta peau
Ta maîtrise explose
Révélant
Sculptée dans ton désir
La forme primitive de ton corps

Sa forme qui s’imprime dans ma bouche
Qui imprime son mouvement
Au flot de paroles qui coulent
A la commissure de mes lèvres

C’est moi qui te prends
Au mot

C’est moi qui te prends
En moi

C’est moi qui te prends
Par la voix

La seule manière de me faire taire
Tu la connais
Tu la sais
Quand devenu fou de mes murmures
De mes suggestions susurrées
Tu transformes mon langage
En cri désarticulé
Muet
Gorgé de sang
Fécond de sens

Tu casses mes mots en morceaux
Qui retombent sur nous comme la sueur
Et tu me laisses

Tu me laisses sans voix

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J’ai retrouvé sans peine l’endroit de nos haltes, tant il demeure inscrit au plus profond de ma mémoire. Je crois que je pourrais fermer les yeux et, sans même tâtonner, m’y diriger tout droit.

Raphaël Aubert, Sous les arbres et au bord du fleuve & autres récits. 2021.

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