
Nous sommes des nuages
Bus par la terre, bus par le ciel*
Ou buvons-nous le ciel, mangeons-nous la terre ?
Les opposées s’attirent, s’éloignent
Les paradoxes, on aime, c’est sage
Chaque élément a son contraire
Son contraire est parfois sa paire
Les extrémités rapprochées sont aussi des couples séparés
Nous sommes des bouches
Imbues de terre, imbues de verres
Bourrées de mots
Les mots ont des reflets, des échos
Des fissures et des morceaux
Qui coulent dans nos gorges
Mais nous sommes des nuages
Gorgés de terre et d’eau
Les mots sont parfois des orages,
Des débris, des tempêtes, des maux
Les mots sont aussi des images
Des pansements, des rideaux
Nous sommes des formes
Mues par le vent, mues par le temps
Que les oiseaux caressent
De battements
Les ailes sont comme les cœurs
Des syllabes et des silences
Des rythmes et des danses
Les ailes sont comme les mots
Parfois émiettent des gouttes de bonheur dans les yeux des nuages
Nous sommes des repères
Reculés par les mers, reculés par l’éther
Nous sommes des repères
À la dérive, muables et charmants
Insaisissables, évanescents
Les mots aussi sont des repères
Ils sont fugitifs, mais permanents
Ils reculent ou nous reculent
Et ils reviennent parfois
Nous sommes des nids blancs
Inondés d’un amour léger
Qui flotte au travers et autour de nous
Nous sommes des nids blancs
Parfois chassés parfois rêvés parfois seuls et déboussolés
Mais parfois si bien entourés
Vides ou débordés
Nous sommes des boîtes aux lettres
Les lettres sont des mots doux
Des doux mots
Des modes d’où ?
Des mots d’errer
D’Hommes et d’air
Modéré
Avec modération, s’vous plaît
*Olivier Pillevuit, Les Pentes du Ciel, “Itinéraire”