Plaisirs éruptifs

Anyali Oviedo Castillo

Des éruptions intenses plutôt que des bêtes érections, la perspective est moins stigmatisante, moins chargée de stéréotypes ; reste seulement une ode aux sexualités. 

Parler brûlures magmatiques, vibrer aux pages de Volcaniques. Leonora Miano, écrivaine d’origine camerounaise, vous le suggère dans l’introduction de son anthologie du plaisir. Non du désir – comprenant l’idée de possession – mais bien du plaisir.

Elle a soumis le titre de cet ouvrage, paru aux éditions Mémoire d’encrier en 2015, à des autrices noires en les invitant à écrire un texte sur leur représentation du plaisir.

Douze récits exaltants dans lesquels le magma féminin écrit les nuits torrides à l’encre indélébile. Tort le coup aux 

« Il l’arrêta, vint se coller contre ses fesses, enlaça le ventre nu. Elle aurait voulu que ses doigts glissent jusqu’à sa fente. Qu’il cherche sa douceur, sa moiteur. Qu’il lui donne la caresse. (..) Elle, liquide, se répandait. Son corps léger flottait comme si le plaisir avait aboli la gravité. Léto, en apesanteur, n’avait plus de corps ni de cœur ni de tête. Elle était la lune et les étoiles. Elle était l’herbe mouillée. Elle était le bruit du vent dans le feuillage. Elle n’était plus. » 

Les fulgurants orgasmes, en plein air, du personnage de Gilda Gonfier peuplent soudain nos nuits, nous donnent envie de les revivre. Provoqués par les braises de l’attirance, assouvis par la fusion de deux êtres. 

Le cunnilingus qui compense le manque d’attention d’un mari impuissant dans Un petit feu sans conséquence de la Guadeloupéenne Gisèle Pineau.

Des rêves érotiques qui perturbent le quotidien d’une avocate sous la plume de Nafissatou Dia Diouf.

Une prostituée reprenant contact avec ses sens grâce à la tendresse d’une relation lesbienne contée par la franco-camerounaise Elisabeth Tchoungi.

« Seigneur, contrairement à cette histoire d’Ève sortie de la côte d’Adam que vous nous avez servie pour pourrir d’emblée les rapports entres sexes opposés, notre relation était exempte de toute visée dominatrice. Ni déesse ni maîtresse. Point de verge intrusive, juste quatre seins à nous deux, nos chairs en miroir, sororales, solidaires. (…) Mon clitoris est mon talisman. Je le caresse tel un chapelet dans une dernière prière. »

Volcaniques parce que le volcan a une forme de phallus mais est aussi creux, un peu androgyne, avec tous les cratères de part et d’autre. Plusieurs orifices de plaisir qui explosent ensemble, constamment en relié, depuis toujours.

Sous la direction de Léonora Miano, Volcaniques : une anthologie du plaisir (nouvelles), Editions Mémoire d’encrier, 2015

0 comments
0 likes
Prev post: SolitudinéeNext post: Que peut-on espérer apprendre du morceau Bande Organisée ? (Et plus généralement, du rap version 2020)

Leave a Reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

J’ai retrouvé sans peine l’endroit de nos haltes, tant il demeure inscrit au plus profond de ma mémoire. Je crois que je pourrais fermer les yeux et, sans même tâtonner, m’y diriger tout droit.

Raphaël Aubert, Sous les arbres et au bord du fleuve & autres récits. 2021.

Inscription à la e-lettre